Depuis 20 ans, le champion olympique et consultant certifié en management de la motivation Edgar Grospiron développe des méthodes et des conférences pour accompagner les RH et managers. Nous l’avons interrogé sur la perte de motivation, voici ses éclairages et conseils.
Comment repérer un manque de motivation dans une équipe ? Quels signes doivent alerter ?
La motivation est une affaire individuelle. S’il y a baisse de motivation chez les individus, cela va pénaliser la dynamique du groupe. Au final, c’est le résultat qui en pâtit : le résultat est le seul indicateur tangible d’une baisse de motivation.
Mais avant de constater que le résultat est impacté, on peut déjà observer des signaux faibles au sein d’une équipe, comme :
- le non respect des délais
- un manque de communication
- des personnes qui se renferment sur elles-mêmes et qui s’en tiennent à leurs tâches quotidiennes
- une hausse des conflits interpersonnels
- une augmentation du taux d’absentéisme
- une augmentation des accidents du travail
Et tout cela va nuire de manière exponentielle aux performances de l’équipe et donc de l’entreprise.

Quelles sont les premières actions à mettre en place une fois qu’on a identifié ce manque de motivation ?
Le premier responsable de la dynamique du groupe, c’est le manager. C’est à lui de garder un œil sur ces signaux faibles et de traiter les problèmes avant qu’ils ne pénalisent la performance : il doit réaligner son équipe.
Son premier acte de management, c’est de bien vérifier que chacun est au clair avec ce qu’on attend de lui, de rappeler pourquoi l’équipe est importante et à quoi chacun contribue. Ensuite, c’est de voir si les valeurs ont bien été comprises et que tout le monde en possède une définition claire et cohérente par rapport à celle du manager. Enfin, c’est de traiter individuellement les baisses de motivation par un suivi sur quatre plans :
- S’assurer que chaque collaborateur a bien intégré toutes les séquences de la stratégie à conduire pour atteindre le résultat
- Piloter individuellement en se basant sur les points forts de chacun
- Amener chacun à concentrer ses efforts sur les basiques du métier
- Un briefing/débriefing de chaque séquence stratégique pour faire progresser le collaborateur
Quel intérêt d’un binôme RH/manager pour mener à bien toutes ces actions ?
C’est là que l’équipe RH peut être utile au manager. Dans l’accompagnement individuel, elle peut apporter des solutions pour traiter une baisse de motivation. Ce peut être une formation, un coaching ou du mentoring, par exemple. Dans tous les cas, un accompagnement extérieur favorisant la montée en puissance du savoir-être et/ou du savoir-faire sera toujours utile dans ce type de situation.
Comment tenir compte du fonctionnement différent des individus dans l’équipe ? Quels leviers pour mobiliser le groupe entier ?
Le management n’est pas une science exacte car les gens sont tous différents. Ils ont des attentes, des besoins, des personnalités différentes. Chaque manager est différent et, lui aussi, a ses attentes, ses besoins et sa personnalité. Ce n’est pas évident de trouver l’adéquation immédiatement. Il y a même des personnalités qui ne fonctionnent pas du tout ensemble.
Manager est un métier qui comporte des basiques, des rites et des rituels : s’ils ne sont pas appliqués, ils affaibliront l’autorité du manager, quelle que soit la personnalité de son collaborateur. Un exemple : ne pas faire un entretien individuel de progrès chaque année, c’est laisser penser au collaborateur qu’il n’évoluera pas dans l’entreprise. Or, ce collaborateur aspire peut-être à prendre plus de responsabilités. Avant d’individualiser son management, il faut voir si le manager respecte les fondamentaux du management qui sont enseignés dans toute formation digne de ce nom.
Ensuite, et je recommande de se former à des outils de profils de personnalité, il est important d’individualiser son management. Bien connaître chacun permet de mieux motiver. Le manager a pour mission de canaliser l’énergie de chaque collaborateur sur un projet d’équipe, au service d’une vision d’entreprise. Voilà déjà deux leviers pour mobiliser un groupe.
Vient ensuite l’animation du groupe. Pour cela, un levier évident est d’organiser des challenges. Les gens ont besoin d’être challengés, y compris de manière ludique, afin de faire du métier un jeu. C’est bien connu, la pression d’enjeu injecte du doute, là où le jeu injecte de la confiance. Un challenge bien organisé avec fixation d’objectif, mesure de l’état d’avancement, émulation, récompense va être un booster de motivation individuelle et collective.
En ayant conscience que les résultats de ces actions ne peuvent pas être immédiats, quels peuvent être les délais pour constater une amélioration ?
Cela dépend d’où l’on part. Si la dynamique d’équipe est brisée à cause d’une perte de confiance de l’équipe dans sa direction, cela va prendre du temps. Il faudra sans doute commencer par purger les frustrations, la colère, la déception avant d’envisager de projeter les gens dans un nouveau défi.
Mais si l’équipe ronronne dans sa routine, la mise en place et l’animation d’un challenge peuvent rapidement produire des améliorations. Trop souvent, les challenges sont considérés comme réservés aux populations commerciales, mais il est possible de challenger toutes les populations d’une entreprise. Le secret d’un bon challenge réside dans son appropriation par les personnes concernées : il est dépendant d’une bonne animation, qui doit à la fois provenir de celui qui lance le challenge (DRH, DIR COM, DG…) et des participants eux-mêmes qui doivent y trouver un lieu de partage de bonnes pratiques.